Qui est Julien Salvado ?


Né pour être sacrifié, l’ordre symbolique transgénérationnel me forçait à un choix, celui d’être le maillon bourreau-victime complice du trafic de fleurs coupées ou d’être embrassé, embrasé par la déflagration raide folle d’une bombe thermonucléaire, à moins de devenir comme la vache, fou. Ni Dieu, ni maître, il ne me restait plus qu’à être Soi.

Petit-fils de l’arlequin de Picasso, je fus saisi par l’ampleur des actes de mon grand-père dont la psyché parcellaire renvoyait à l’ordre d’un possible consistant en la sortie d’un certain labyrinthe où par un travail d’artiste peintre humble et solitaire, il finira par s’introduire dans l’ordre symbolique culturel de sa terre de naissance, représenté par le musée Reine Sofia de Madrid. Reste entier pour moi la question de la relation à l’âme, s’agit-il d’une transmission en forme de passe ou d’impasse ?

Dédale, mon père, avait réhabilité le labyrinthe ancestral. Pasiphaé, ma mère, tout en vivant sur l’île de Lesbos, rêvait d’amour incestueux avec Mithra, le frère de Dédale. Caïn, mon frère, réincarné depuis au moins deux générations dans la lignée paternelle pensait que je lui avais pris une quelconque place, une place enviée ou à envier : le sein de la mère certes nourricier, mais cancéreux.

L’interaction de tous ces mythes demandant le tribut du sang, ou sinon point d’amour dévoration donné au héros sacrifié commença à me peser et être sans issue. Une passe cependant il m’en fallait une, sinon j’allais mourir avant même d’avoir vécu. J’en appelais donc à l’oracle, réclamant une autre issue, un autre mythe salvateur en invoquant mon nom, mantra contenant la preuve que je pouvais me sauver, être sauvé. Le prénom n’avait lui plus de sens, « jeu lien » entre père et mère devenant caduque par contrat rompu au divorce.

Les astres, dieux de l’Olympe psychique, avaient opéré. Quoi, comment ! Je n’en savais rien. Pour moi une seule chose comptait, vivre avec quelqu’un, créer d’autres liens intimes. Eros arriva et pris par le vent nous partîmes vivre la vie rompant les amarres, remontant le Styx pour ressusciter à ma vie, à notre vie. La naissance de Gérard et Julien venait de se faire et une grande épopée intérieure s’enclenchait.

Beaucoup d’inconscience, d’ardeur et de joie stimulèrent le vent du large. Bateau presbytère, nous fîmes escale à Redu. Isis invoquée et ses prêtres embaumeurs parfumeurs à l’œuvre, nos corps inconscients se mirent à se reconstituer, long et douloureux chemin faisant partie de l’œuvre et permettant la résurrection. Nous voilà maintenant ressuscités et corps glorieux, en marche vers de nouvelles aventures et avec paix et amour à la construction de Géjuland.